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Les travailleurs de nuit sont des salariés aux horaires de travail atypiques. Reconnu pour être la source d’une plus importante pénibilité que le poste de jour, de travail de nuit offre des compensations particulières, notamment en termes de repos. Alors, qu’est-ce qui est considéré comme du travail de nuit ? Quels sont les impacts de ce type d’organisation sur la santé ? Quelles précautions prendre au cours de cette période de travail ? Quelle législation encadre le travail de nuit pour ces salariés ?

Règles et réglementations en 2024 pour le travail de nuit

Modifié par la loi travail et les ordonnances Macron, le travail de nuit (et de soirée) obéit à des règles très particulières.

Selon l’article L3122-31 du Code du travail, et à défaut d’un accord collectif dans l’entreprise prévoyant d’autres dispositions, un salarié est considéré comme travailleur de nuit à condition qu’il remplisse l’une de ces 2 conditions :

  • Il effectue, de manière habituelle, au moins 3 heures consécutives durant la période de nuit, au moins 2 fois par semaine ;

  • Ou 270 heures de travail de nuit durant 12 mois consécutifs.

Dès lors, il ne suffit donc pas qu’un salarié soit exceptionnellement appelé à travailler tard, ou en urgence, au cours la nuit, pour qu’il soit considéré comme un travailleur de nuit. S’il est amené, de manière ponctuelle, à travailler pendant la soirée ou la nuit, le salarié sera alors rémunéré en heures supplémentaires majorées, mais il n’aura pas le statut de salarié en travail de nuit.

travailler de nuit

Qui est considéré comme travailleur de nuit ?

L’horaire de nuit est un horaire de travail effectué pendant une durée totale ou partielle de la nuit. Ces horaires sont définis par des accords d’entreprise ou d’établissement, ou à défaut par la convention collective. Ils sont compris entre 21 heures et au plus tard 7 heures du matin, comprenant l’intervalle entre minuit et 5 heures.

Ces horaires de travail atypiques concernent de nombreux secteurs professionnels, tels que la santé, l’armée, l’industrie, la grande distribution, la police, la sécurité…  

Changements réglementaires concernant le travail de nuit pour les salariés de 50 ans et plus

Le travail de nuit après 50 ans ne fait pas l’objet de réglementation particulière, mais il sera pris en compte dans le C2P, le Compte Professionnel de Prévention : ce compte permet de déterminer et de référencer les facteurs de risques professionnels d’exposition d’un travailleur au-delà de certains seuils. En fonction de son exposition à certains risques (travail de nuit, travail posté, travail répétitif…), le salarié cumule des points sur son C2P.

Le travailleur peut alors se servir de ses points acquis pour :

  • Bénéficier d’un travail à temps partiel sans perte de salaire ;
  • Valider des trimestres de majoration de durée d’assurance vieillesse qui permettent de partir plus tôt à la retraite ;
  • Partir en formation, réaliser une VAE, un Bilan de Compétences ou un PTP (financer un projet de reconversion professionnelle) afin d’accéder à des postes qui sont non exposés ou qui sont moins exposés à des facteurs de risques professionnels. Pour mobiliser le C2P pour ces 4 actions, le salarié doit obligatoirement faire une demande auprès de Transitions Pro Grand Est.

Les exemptions et les droits des travailleurs de nuit âgés

Les salariés qui sont âgés de plus de 50 ans peuvent, sur leur demandé, être dispensés d’effectuer des plages de nuit.

Par ailleurs, les travailleurs de nuit permanents de plus de 50 ans et ayant eu cette qualité pendant une durée de 12 ans, consécutifs ou non, dans l’entreprise ou dans la branche, peuvent sur leur demande être dispensés d’effectuer des plages de nuit tout en bénéficiant du maintien pour la moitié de la majoration de rémunération, correspondant au travail effectué en plage de nuit au cours des 12 derniers mois.

Impacts sur la santé du travailleur de nuit et précautions

Effets du travail de nuit sur la santé après 50 ans

travail de nuit

En 2007, le Centre international de recherche sur le cancer a étudié le risque de cancer du sein et de la prostate lié aux organisations de travail atypiques. Il a ainsi classé la perturbation des rythmes induit par le travail de nuit en cancérogène probable.

Mais ce n’est pas tout : le travail de nuit a d’importantes conséquences sur le sommeil, la somnolence et augmente le risque de syndrome métabolique. Les personnes qui effectuent ces horaires atypiques sont plus exposées à la dépression, à l’anxiété, et sont plus irritables.

Les performances cognitives et la mémoire sont également affectées, et les risques  d’obésité, de prise de poids et de diabète de type 2 sont augmentés avec le travail de nuit.

Par ailleurs, en travaillant pendant ces horaires, les salariés risquent davantage de connaître des troubles coronariens (ischémie coronaire et infarctus du myocarde), de faire de l’hypertension artérielle et des accidents vasculaires cérébraux ischémiques.

Précautions et mesures de protection de la santé du travailleur de nuit

Des recommandations médicales de bonnes pratiques ont été publiées par la Société Française de Médecine du Travail. Le médecin du travail doit informer les travailleurs de nuit sur les effets pathogènes possibles de ce type de travail, et donner une information spécifique aux femmes en âge de procréer sur les risques éventuels en cas de grossesse, et sur le risque de cancer.

Par ailleurs, le médecin du travail doit interroger le travailleur de nuit sur son temps de sommeil sur 24 heures et sa capacité de récupération. Des questions sur le chronotype (lève tôt, couche tard…), les habitudes alimentaires, et l’hygiène de vie sont également posées : des outils tels que les questionnaires ou les échelles sont utilisés afin de collecter ces informations.  

Un suivi médical régulier du travailleur de nuit est également effectué par le médecin du travail. Ce dernier s’attache en particulier rechercher des effets pathogènes sur la santé, tels que des troubles du sommeil, des troubles de la vigilance, une somnolence, des accidents du travail, des problèmes cardio-vasculaires, une dépression, des problèmes gynécologiques…

Rémunération et avantages spécifiques du travailleur de nuit

Travail de nuit : un critère de pénibilité reconnu pour la retraite

Le travail de nuit appartient aux critères de pénibilité, et permet aux salariés d’acquérir des points pénibilité à partir de 120 nuits par an

Ces points peuvent être convertis en heures de formation, en réduction du temps de travail ou en trimestres de retraite. C’est à partir de 55 ans, que les points ont également la possibilité d’être convertis en trimestres de retraite, à raison d’un trimestre pour dix points. Vous pourrez ainsi obtenir les conditions du taux plein au plus tôt et partir à la retraite jusqu’à deux ans avant l’âge légal.

Par ailleurs, si vous avez commencé à travailler avant 20 ans, ces trimestres de majoration comptent dans votre durée cotisée pour le calcul de vos droits à la retraite anticipée pour carrière longue.

Majorations salariales et indemnités du travailleur de nuit

Selon la Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des Statistiques), le travail de nuit est le plus rémunérateur pour les ouvriers et les employés. Il procure un gain salarial net de 5,2 %, quel que soit l’horaire effectué pour les employés.

Pour les professions intermédiaires, on observe une majoration salariale de  +3,7 % en travaillant plus de la moitié des heures durant la nuit, +2,7 % dans le cas contraire. 

Travail de nuit et compensations

Un accord d’entreprise ou d’établissement ou une convention ou accord collectif de branche qui met en place le travail de nuit prévoit les contreparties. Elles sont applicables :

– Sous forme de repos compensateur ;

– Et, le cas échéant, sous forme de compensation salariale.

En cas de travail de nuit, la contrepartie sous forme de repos compensateur, intégralement rémunéré, est obligatoire. Ce repos compensateur peut être attribué dans le cadre d’une période de 12 mois sous forme d’un repos forfaitaire équivalent à 3 postes de travail, (8 heures par poste). Cette période de repos ne peut pas être remplacée par une prime ou une contrepartie financière. Toutefois, elle peut être complétée par une compensation salariale.

Adaptation au travail de nuit et conseils pratiques

Dormir un nombre suffisant d’heures

Travailler de nuit entraine une dette de sommeil. Ce manque de repos apporte de nombreux effets négatifs sur la santé, et peut également déclencher des sautes d’humeur qui gâchent vos moments de vie sociale.

Pour récupérer du travail de nuit, il est essentiel de dormir sur une période de 8h consécutives. Si vous n’arrivez pas à dormir 8h d’affilée, veillez à dormir au moins 5h après une nuit de travail et 6h après la deuxième nuit. Ajustez ensuite votre sommeil grâce à une sieste d’1h30, par exemple avant d’aller travailler.

Si votre travail de nuit le permet, faites une sieste de 20 ou 30 minutes en milieu de nuit, afin d’augmenter votre niveau vigilance. Ne la programmez par trop tard dans la nuit, car elle pourrait vous apporter de l’énergie qui vous empêcherait de dormir en rentrant chez vous.

Pour réussir à bien dormir lorsque vous effectuez un travail de nuit, et à trouver le sommeil alors qu’il fait jour, veillez à être le plus régulier possible, même pendant vos journées de congé. Couchez-vous et levez-vous chaque jour à la même heure, afin de régler votre rythme circadien.

Mettre en place un bon environnement de sommeil

Pour que votre sommeil soit véritablement récupérateur, vous devez dormir au calme :

-Sensibilisez vos proches à respecter ces moments de sommeil, qui sont importants pour votre santé ;

-Mettez votre téléphone en silencieux ;

-Portez des bouchons d’oreille ;

Pour trouver facilement le sommeil, veillez à ce que la chambre soit chauffée à environ 18 ou 19°C, pas plus. S’il fait trop chaud, votre endormissement sera retardé.

Faire de l’exercice au bon moment

Que vous ayez un poste de jour ou un travail de nuit, l’activité physique est essentielle pour votre santé. Elle doit faire partie de votre routine quotidienne pour rester en forme, et vous aider à régler votre rythme circadien.

Faites votre séance de sport avant d’aller au travail, et non pas au retour. En effet, le sport rebooste votre niveau d’énergie et pourrait vous empêcher de trouver le sommeil si vous le faites le matin après le travail.

Simuler le jour lorsque l’on doit rester éveillé et la nuit lorsque l’on doit dormir

La lumière est le plus puissant synchronisateur de votre horloge biologique. Dans l’obscurité, l’hormone du sommeil, la mélatonine, est produite.

Pour trouver le sommeil, vous aurez donc besoin de plonger votre chambre dans le noir, voire d’utiliser un masque de sommeil. Portez de verres fumés le matin, en rentrant du travail, pour favoriser l’endormissement dès que vous arrivez à la maison.

Pour améliorer le bien-être au travail, chaque détail compte : le niveau de luminosité doit être élevé, et simuler celle du jour. Dès lors, exposez-vous à la lumière vive lors de la période de travail, surtout en première moitié de nuit.

Vous pouvez également réaliser des séances de luminothérapie avant le travail, pour améliorer votre vigilance.

Manger les bons aliments

Pour régler votre horloge biologique, l’heure des repas est également importante. Prenez vos deux plus gros repas au lever et en milieu de nuit, et gardez le repas le plus léger pour le matin, avant d’aller vous coucher.

Vous pouvez instaurer un en-cas riche en protéines afin de limiter la somnolence en seconde partie de nuit.

Les règles à suivre sont les même que pour un poste de jour : veillez à préparer des repas équilibrés, riches en fruits et légumes, qui vous donnent de l’énergie et vous garderont en bonne santé. Les superaliments tels que les graines de chia, les amandes ou encore, les baies de goji, le curcuma devront trouver une place quotidienne dans vos assiettes.

Évitez les excitants en deuxième moitié de nuit (thé, café, soda) qui retarderont l’endormissement. Eloignez également les aliments très épicés, car les travailleurs de nuits sont plus sujets aux problèmes gastriques comme le reflux acide.

FAQ

Quelles sont les durées maximales du travail de nuit ?

La durée quotidienne de travail de nuit ne peut pas dépasser 8 heures de travail de suite. Au cours d’un poste de nuit d’une durée égale ou supérieure à 6 heures, le travailleur de nuit doit bénéficier d’un temps de pause au moins égal à 30 minutes, lui permettant de se détendre ou de se restaurer. 

Est-ce que le travail de nuit est considéré comme un travail pénible ?

Oui, le travail de nuit est un facteur de pénibilité pris en compte dans le cadre du compte professionnel de prévention des salariés.

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